"Alibi Club" Francine Mathews
Paris 1940.
Sally King attend Philip Stilwell qui doit lui faire sa demande en mariage. Le rendez-vous n’étant pas honoré, inquiète, elle se rend chez son fiancé et découvre une scène bien macabre.
- Il est mort, Sally. Il est mort.
- Mais comment… ?
Elle repoussa Shoop. Les eux maintenant ouverts, elle le regarda en face :
- Qu’est-ce qui a bien pu … ?
- La police pense qu’il a fait une crise cardiaque.
Il était gêné, par ses propres mots et tous les non-dits : la signification du fouet, l’incontestable tumescence. Deux hommes morts dans une simultanéité qui évoquait l’orgasme. Mais Max Shoop n’était pas du genre à s’avouer mal à l’aise : il affichait une gravité parfaite, les traits aussi peu expressifs que s’il commentait la météo.
- Qui est … le pendu ? balbutia-t-elle.
Shoop leva les yeux au ciel sous ses lourdes paupières.
- On m’a dit qu’il venait d’un des clubs de Montmartre.
Vous étiez au courant pour Philip ?
- Qu’il était… Qu’il…
Elle s’interrompit, incapable de verbaliser.
- Ma pauvre petite.
Lèvres serrées, il l’entraîna dans l’escalier, vers la loge de la concierge à l’étage en dessous, où l’attendrait une bonne lampée d’eau-de-vie.
Devant la porte de la vieille dame, la main de Max déjà levée, prête à toquer, Sally lança d’une voix déterminée :
- Ce n’est pas ce que vous croyez, vous savez. Ce n’est pas ce que vous croyez.
Elle ne croit pas un instant à ce qui, pour elle, est une sordide mise en scène. Elle est convaincue qu'il n’y avait pas deux mais trois hommes et que Philip n’a pas pu se suicider. Qui plus est, des dossiers liés à LG Farbenindustrie ont disparu. Elle missionne donc Joseph Hearst, attaché de l’ambassade des Etats-Unis pour l’aider à éclaircir ce mystère.
Mais dans un Paris occupé et en proie à l’inquiétude, la priorité n’est pas à la résolution de cette affaire et l’enquête s’enlise.
Sans partager l'avis des Inrockuptibles et du bandeau "scotchant", les qualités essentielles de ce roman sont une écriture remarquable et des personnages très travaillés. Je le classerai pour ma part dans la catégorie des polars historiques et non du thriller, comme le mentionne la couverture.
L’atmosphère de l’époque est parfaitement bien retranscrite et le lecteur sera entraîné dans le sillage de Coco Chanel, Memphis Jones – une chanteuse de jazz noire qui ne sera pas sans faire penser à Joséphine Baker – et Frédéric Joliot Curie.
Entre chien et loup, Montmartre frémissait : des femmes en robe de chambre apparaissaient sur les perrons, balayaient les marches souillées de crasse et de vomissures dans le crincrin de phonographe qui s’échappait des cuisines fatiguées. La plupart ne se préoccupaient pas des réfugiés qui s’étaient multipliés comme des champignons du jour au lendemain : que faire quand il y en avait tant ? C’était un décor parfait pour le suicide, songea Spatz, au souvenir de la femme éperdue de douleur ; il n’avait jamais pu supporter Montmartre de jour. Coincé dans un angle de la place du Tertre, l’Alibi Club marquait son petit bout de territoire extérieur par un puissant éclairage au néon et une devanture rouge vif.
Editions Toucan Noir
Format poche
346 pages
9,95 €
Prochaine chronique : " Dernière séance" de Roland Sadaune
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