'Jubilé' Henri Girard
Prenez un cantonnier, tout jeune retraité. Il se souvient de ses jeunes années. Lui, sa vie et son amour des livres. Dans un premier temps.
Puis vient sa rencontre avec un jeune vicomte qui a un secret, secret qui s'avère être un peu trop lourd pour ses frêles épaules et qui éprouve bien des difficultés à vivre avec. Et surtout, qui ne peut se résigner à accepter le destin qu'on lui a choisi. Comme si l'on était encore obligés de subir sa vie de nos jours. Diantre, nous sommes au XXIème siècle ! Il va donc décider de l'aider. Et ce, avec la complicité d'un Ecossais farfelu et d'un facteur alcoolisé du tendon. Tous les trois vont donc, telle une association de malfaiteurs, échafauder un plan, afin de sortir le jeune vicomte de ce mauvais pas. Association de malfaiteurs. J'ai dit malfaiteurs ? Alors je rectifie. Disons plutôt de bienfaiteurs. Des heureux bienfaiteurs. Tout cela dans un décor que l'on imagine aisément. Un petit village perdu au fond de nulle part et auquel le narrateur est tant attaché. Sa place, son bistrot 'le café du dernier sou chez Marcel', son église, la maison du cantonnier où l'on pourrait presque y retrouver les odeurs d'antan et où le temps parait s'être figé. Tout cela sur un ton léger, vif et enjoué. De l'humour à chaque ligne (ou presque). Henri Girard a l'art de maîtriser les mots, de les faire tournoyer. Une écriture remarquable.
Une narration à la première personne. Une époque que nous n'avons pas connue mais dont nos parents nous ont si souvent parlé. Une époque bien révolue. Mais dont il fait bon se souvenir. Surtout sous la plume de l'auteur, où il fait bon se perdre. Le temps d'un roman.
Si toutefois vous n'êtes pas encore totalement convaincu(e)s du plaisir que peut vous procurer cette lecture, lisez alors une partie de la 4 de couv : ...'Liez cette association de bienfaiteurs de quelques promesses, saupoudrez avec les extraits de quatre livres ni trop verts ni trop faisandés que vous aurez choisis avec soin. Laissez roussir à feu vif. A part, battez les grosses légumes jusqu'à les attendrir. Ici, un maire, un curé et un instituteur. Lardez-les de bons mots et réservez. Une fois le contenu de votre braisière réduit à sa plus noble expression, jetez-y les édiles en pâture, remuez vigoureusement puis déglacez vos sucs d'une bonne bolée de cidre. Savourez au coin de l'âtre le résultat jubilatoire de cette carbonade.'
Oui, c'est précisément cela. Un roman que l'on savoure installé bien confortablement et que l'on prend le temps de déguster.
Pour le plaisir ...
...'Avec un épouvantail comme lui, tu files la déprime aux oiseaux, pas la trouille'...
...'C'est plus facile de curer un fossé que de purger une tête'...
...' - Tu causes toujours comme çà ?
- Qu'est-ce-à dire ?
- Avec un vocabulaire de douairière et la grammaire qui va avec ?
- Cela vous indispose-t-il ? Vous trouvez mon discours ampoulé ?
- Hein ! Non... Oui... Enfin, ça me fait tout drôle. Tu es raide comme tu causes.
- Je vous promets d'entreprendre... que je vais faire un effort.
- Bravo mon gars ! Bravo'...
Egalement auteur de 'Coup de grisou' (2001), 'Sous l'aile du concombre (2003), 'Droit devant toi' (2007), le dernier roman de Henri Girard est 'L'Arlésienne de Tidbinbilla' (2011) paru aux Editions In Octavo.
Editions l'Arganier
299 pages
18 euros
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