'Le psychopompe' Dominique Maisons
Alice Jourdan vient de perdre son mari. En rentrant un soir chez elle, elle se fait agresser par un vagabond qui a... les traits de son défunt mari.
...'Pendant que la ville défile par la vitre, elle se ressasse cette vérité, cette évidence difficile à appréhender : soit elle est complètement folle, soit son mari, mort depuis deux mois, vient de l'agresser à quelques mètres de là où ils habitaient. Elle vient d'être agressée par un mort, on perdrait la raison pour moins que cela'...
Victor Bellanger, flic marginal et personnage au tempérament bien trempé, va être le seul à croire au témoignage de cette femme que tous croient folle et prendre l'enquête en main. Seulement, il n'est pas pris au sérieux par son supérieur hiérarchique qui refuse catégoriquement de lui fournir la moindre aide qui soit. Il va donc devoir braver les interdits et mener sa propre enquête. Enquête qui prend une dimension encore plus effrayante quand Romain, le frère d'Alice, disparaît et que ses soeurs jumelles sont à leur tour menacées.
Les premières pages de ce roman laissent à penser à une histoire dont l'intrigue est somme toute assez banale. Mais au fil des pages, celle ci se densifie et de nouveaux éléments plus surprenants les uns que les autres font qu'elle est en réalité bien plus complexe qu'elle n'y paraît.
Une enquête où l'environnement familial de la jeune femme n'est pas étranger, où les secrets vont se dévoiler au fil des pages.
Et quels secrets !
Le lecteur entre immédiatement dans l'action. Les scènes y sont décrites de façon très réelles, très visuelles. Et le suspens est savamment entretenu tout au long de ces 560 pages.
Quant à la fin, elle est on ne peut plus inattendue.
Un seul bémol : le personnage du nécrophage (et nécrophile de surcroît) qui rendent certaines scènes très violentes et assez difficiles à supporter.
Le titre, quant à lui, est suffisamment évocateur. Un psychopompe était, dans la mythologie, la divinité qui conduisait les âmes des morts dans l'au- delà.
En conclusion, un premier roman qui, pour un coup d'essai est excellent. Un roman qui répond à tous les codes du thriller et dont vous vous souviendrez longtemps, tant de part la construction de l'histoire que de part le style de l'auteur. Un auteur qui a bien mérité son prix obtenu en 2011 (Prix VSD du polar).
'Le psychopompe' est une lecture que je recommande à tous les amateurs de thrillers.
En 'bonus' je vous livre les réponses de l'auteur à un questionnaire et le remercie vivement d'avoir pris le temps d'y répondre.
Qui êtes-vous ?
Un auteur qui essaye de donner la priorité à l’imagination et à l’originalité. Je veux donner à lire des histoires et des personnages qui ne sortent pas du recyclage de succès pré existants ou d’archétypes éculés. J’aime la littérature populaire quand elle respecte ses lecteurs et n’hésite pas à bousculer les codes du genre et je la déteste quand elle se contente de ressasser des recettes sans saveur.
Du point de vue biographique, j’ai 40 ans, j’ai travaillé pendant 12 ans chez Sonymusic avant que les gens arrêtent d’acheter des disques. Je suis aujourd’hui gérant de sociétés dans la production audiovisuelle, la presse jeunesse et l’e-commerce. De l’uniformité nait l’ennui pour l’éviter, je touche à tout !
Votre trait principal de caractère ?
L’opiniâtreté. Je suis assez indolent, mais je ne lâche jamais mon os. Il faut l’être pour écrire quand on doit mener de front son travail d’auteur, ses activités professionnelles et sa vie de famille… Sans ce trait de caractère, mes livres n’existeraient pas, c’est sûr…
3 qualités et 3 défauts ?
Bienveillance, tolérance, imagination.
Jalousie, pusillanimité, timidité.
Qu'est-ce qui vous plait dans l’écriture ?
La liberté avant tout, être seul maître de mes choix et de mon rythme de travail. Puis le partage et l’ivresse de la création, c’est vraiment une sensation exceptionnelle que celle qu’on ressent quand on termine une œuvre qu’on a portée de A à Z et dont on se sent fier… quand ce plaisir est partagé par les lecteurs, c’est encore mieux… Évidemment !
Qu'est-ce qui vous a donné l’envie d’écrire ?
Le plaisir que j’éprouve à faire partager mes histoires, depuis tout petit, j’ai toujours été un conteur. L’écriture est le seul média avec lequel on a une liberté totale, pas de contrainte budgétaire, de casting ou d’avis d’un producteur… Tout est possible, on peut tout envisager du bout des doigts, il faut juste oser !
Comment écrivez-vous ? Avez vous des moments privilégiés dans la journée ?
Comme presque tous, j’aime écrire le matin, au calme, dans un bureau avec une grande fenêtre, une tasse de thé vert qui fume et un chat qui ronronne… Mais ces circonstances idéales ne se réunissent pas si souvent, hélas. Alors j’écris un peu tout le temps, partout, comme un voleur, subrepticement, petit bout par petit bout… L’idée forte est de ne pas passer une journée sans avoir fait quelque chose pour mon travail en cours… Quand je peux, j’écris 6H le matin, pendant les vacances, mais une telle intensité d’écriture me rend asocial, je ne pense plus qu’à mon livre et je deviens un véritable ectoplasme, toujours perdu dans un autre monde et à peine capable de savoir ce qu’il est en train de faire quand il n’écrit pas… Vivre avec un auteur dans ces circonstances est un véritable sacerdoce !
Votre loisir principal ?
Hormis l’écriture, la lecture, la musique, le cinéma et les séries TV… Quand j’ai un peu de temps, ce qui est rare, j’essaye de m’investir dans la vie publique, politique et citoyenne. Je pars du principe que critiquer sans agir ne sert à rien et qu’il faut œuvrer pour ses idées et valeurs, quelles qu’elles soient.
Ce que vous détestez par-dessus tout chez un homme ?
Et chez une femme ?
L’égoïsme, la suffisance, l’intolérance pour les deux sexes. Pas de distinction, ces défauts sont un obstacle insurmontable à l’échange, au partage, à la vie sociale. Je ne pense pas pouvoir lier des relations durables avec des personnages souffrant de ces tares…
La même question, mais avec ‘ce que vous préférez’
La joie de vivre, l’humour, la générosité. Et pour les femmes, la sensualité ! Parce que ce sont ces qualités qui rendent les rapports humains intéressants. La générosité me semble même nécessaire pour écrire, il faut penser au lecteur en permanence et écrire avant tout pour lui, je n’aime pas les écrivains qui se regardent le nombril ou qui cherchent à régler des comptes. La générosité est aussi nécessaire dans l’écriture.
Votre devise ?
Je vais tricher un peu et vous en donner deux :
La première « Agis en sorte que la maxime de tes actes puisse être érigée en règle universelle. », de Kant, parce que c’est sans doute celle qui a le plus structuré ma vie et qui me sert encore aujourd’hui de référence morale.
La seconde « On a le droit de faire des enfants à l’Histoire, à condition qu’ils soient beaux. », de Dumas, parce que c’est celle qui me sert le plus lorsque j’écris. On ne doit pas toujours respecter l’Histoire et les faits sinon on devient prof ou journaliste. Un auteur doit prendre des risques, créer, ouvrir de nouvelles voies, ce qui compte c’est l’élan et le souffle, emporter le lecteur dans son univers. Il faut être rationnel, mais pas réaliste !
Un livre en écriture ?
Il y en a déjà un à paraître, en octobre, qui est terminé. Il s’intitule « Rédemption » et continue sur le thème du Vaudou, cette fois-ci haïtien en s’attachant aux pas d’un flic qui paye pour ses années de dérive. Il se démène au cœur d’une machination tortueuse conçue pour faire de lui l’instrument de la vengeance d’un jeune homme qui s’est fait voler sa vie à cause de superstitions. C’est autant un ample roman d’aventure qu’un thriller, on y voyage beaucoup dans le temps, dans l’espace et même dans le monde des rêves…
Celui que j’écris en ce moment est un hommage aux feuilletonistes français du début du siècle. Je vais essayer de faire revivre un personnage mythique de la littérature populaire injustement peu utilisé depuis. Ça sera un thriller aussi sombre et sans soute plus violent que le Psychopompe avec une source d’inspiration différente puisque j’oublierai le vaudou et l’Afrique pour me plonger dans la culture populaire française, dans la sphère des Anonymous et dans les pratiques cannibales...
J'ai bien du mal à croire qu'il s'agit là de votre premier roman. Pourquoi avoir attendu si longtemps et où trouvez vous votre inspiration ?
C’est pourtant le premier. L’envie d’écrire je l’ai depuis des années, mais pour la concrétiser il faut mettre en place une véritable hygiène de vie ! Quand on travaille et qu’on a une famille, trouver le temps de faire les recherches, la construction, la réalisation et la correction d’un roman demande beaucoup d’organisation et de sacrifices, il faut croire que je n’étais pas mur avant pour mettre tout cela en place. Mais depuis les idées et les envies s’enchaînent, je ne suis pas prêt d’arrêter.
Pour l’inspiration, j’ai tendance à dire que tout ce que je lis, vois ou entends peut alimenter mon travail. Il y a une envie initiale, un univers que j’ai envie d’explorer, puis une partie technique de construction et de définition des personnages et puis après, tout me nourrit, je ne gâche rien ! Méfiez-vous quand vous côtoyez un auteur, il peut vous voler quelque chose à tout moment !
Votre rêve le plus cher ?
Partir vivre à Venise et écrire… J’adore cette ville, elle est illogique, bruyante, branlante, vieille et peinturlurée, envahie par des hordes barbares et à reconquérir à la nuit tombée ou au détour d’une ruelle moins fréquentée. Elle est libertine et rebelle et résistera encore des années à la mer qui veut le reprendre. Si je pouvais poser mes valises là-bas et vivre de mes écrits, je pars demain !
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