Coup de coeur "Arrêtez-moi" * Lisa Gardner
« Pourquoi le 21 janvier ? Et pourquoi pensez-vous que vous connaîtrez votre assassin ? »
Alors la fille raconta. Son histoire était impressionnante, à vrai dire. Sa première amie d’enfance assassinée deux ans plus tôt, le 21 janvier, puis la seconde amie, assassinée un an après, exactement à la même date, ce qui faisait de Charlie la dernière rescapée du trio. Celle-ci connaissait le nom des policiers chargés des enquêtes, elle mentionna même le rapport rédigé par un ancien profileur du FBI, Pierre Quincy, qui avait étudié les scènes de crime.
« Ses conclusions ? » ne put s’empêcher de demander DD. Non pas qu’on puisse se fier au rapport d’un fédéral, mais bon… Elle avait pris des notes. Lors d’une formation, elle avait fait la connaissance d’un des enquêteurs de Rhode Island, Roan Griffin. Elle lui passerait peut-être un coup de fil.
« Vu l’absence de preuves matérielles (pas d’effraction ni de traces de lutte), l’hypothèse de Quincy est qu’il s’agit d’un individu d’une intelligence supérieure, qui raisonne et se comporte face aux autres avec méthode. Peut-être connu des victimes, en tout cas qui paraît de prime abord inoffensif. Il dispose sans doute de compétences verbales supérieures à la moyenne, ce qui expliquerait qu’il ait réussi à se faire inviter chez les victimes et à maîtriser leurs réactions jusqu’au dernier moment ».
[…]
« Bon, qu’est-ce que vous voulez ? » finit par demander D.D.
[…]
- Je vous avais dénichée sur Google. Je cherchais un enquêteur de la police criminelle de Boston et c’était votre nom qui revenait tout le temps. C’est vous qui avez sauvé la petite fille d’une policière, vous qui avez résolu l’affaire des tueries familiales en série, vous qui avez retrouvé cette femme qui avait disparu à South Boston. Je me suis un peu renseignée et… » Elle repoussa son mug de café, regarda D.D. et haussa les épaules : « Je ne sais pas ce qui va se passer dans quatre jours. Je crois que je voulais juste rencontrer celle qui enquêtera peut-être sur mon assassinat. Et je voulais que vous me rencontriez aussi parce que ça pourrait servir. Peut-être que, ayant parlé avec moi, vous vous décarcasserez davantage. Et vous finirez par l’arrêter. Il faut bien que quelqu’un le fasse.
J-4.
Le compte à rebours a commencé. Quatre jours pour comprendre, quatre jours pour faire la lumière sur la requête assez particulière de cette jeune femme qui laisse quelque peu sceptique D.D. ainsi que le capitaine O.
Dans un premier temps, le voile sera petit à petit levé sur Charlène : son enfance, son passé, sa vie, ses craintes, ses doutes, et ses angoisses. Mais surtout cette angoisse permanente qui la taraude : celle du samedi 21 Janvier, journée fatidique où elle est persuadée qu’elle sera assassinée tout comme ses deux meilleures amies.
Voyage aux confins de la folie pour cette petite fille qui a grandi avec la terreur comme seule alliée, l’angoisse permanente à l’égard de celle qui est sensée protéger son enfant : sa mère. Un récit au cours duquel Charlène, qui est convaincue n’avoir plus que quelques jours à vivre avant d’être assassinée par le même meurtrier que ses deux meilleures amies, va se découvrir, apprendre à se connaître et surtout obtenir les réponses aux questions qu’elle se pose depuis sa plus tendre enfance.
Parallèlement, une seconde enquête est menée sur un réseau pédophile par la police de Boston.
Mais qui est réellement cette femme ? Que s’est-il passé dans ses premières années ? Et où se trouve sa mère qui lui a infligé les pires sévices ? Est-elle morte ou simplement disparue ?
Charlène est-elle sincère ? Ou bien joue-t-elle un double jeu comme auraient tendance à le penser les deux enquêtrices ? Où se situe la vérité ? Où se situe le mensonge ? La frontière est bien mince dans le cas présent.
Exorciser les démons, faire ressurgir les fantômes du passé ; en cela, Lisa Gardner excelle dans ce domaine. Elle n’a pas son pareil pour créer l’atmosphère qui sied parfaitement au récit. Elle brouille les pistes et tire les ficelles avec un très grande habileté, oriente son lecteur à sa guise, le laissant croire qu’il a enfin compris pour mieux retourner la situation l’instant d’après.
Une narration à la première personne ayant pour effet de prendre à parti le lecteur, un style très simple mais aucune longueur dans cet excellent page-turner.
Un roman totalement addictif qui révèle le talent de l’auteure qui rappelle que la vérité ne se situe pas toujours forcément là où on l’attend et qu’il faut toujours se méfier des apparences.
J’ai toujours tendance à être sur la réserve quand je vois des 4 de couv assez élogieuses ou encore quand je lis des romans qui ont eu très bonne presse et des critiques dithyrambiques. Mais dans le cas présent, il faut avouer que je n’ai aucun point négatif à émettre.
« Arrêtez moi » qui vient de paraître aux Editions Albin Michel sera mon second coup de cœur de l’année après « Seuls les vautours » de Nicolas Zeimet.
« Sur les listes de best-sellers du New York Times pendant plusieurs semaines, Arrêtez-moi a été salué aux U.S.A. par le Library Journal et l’International Thriller Writers comme un des meilleurs suspenses de l’année.
Editions Albin Michel
20,90 €
470 pages
Traduit de l’américain par Cécile Deniard
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